Polémique sur les émoluments des députés : Les « vérités » de Mboso vivement attendues

Après trois mois de break, le Parlement congolais ouvre ce jeudi 15 septembre, sa deuxième session ordinaire. Ce, conformément l’article 115, alinéa 1 de la Constitution. Selon cette disposition de la loi suprême, « l’Assemblée nationale et le Sénat tiennent de plein droit, chaque année, deux sessions ordinaires. La première s’ouvre le 15 mars et se clôture le 15 juin. La deuxième commence le 15 septembre et prend fin le 15 décembre. »

Cependant, la particularité de cette session de septembre, est qu’elle sera essentiellement budgétaire. Les deux chambres devront donc examiner dans les moindres détails, le projet de loi de finances pour l’exercice 2023. Le but de l’exercice consiste à doter le gouvernement de moyens de sa politique. A cette matière principale, s’ajoutent sans doute les arriérés de la session de mars et, éventuellement, de nouvelles matières, à l’initiative, soit du Gouvernement (projet de loi), soit des parlementaires (proposition de loi). Evidemment, sans exclure à priori, le contrôle parlementaire.

Entendu que la loi de finances détermine les ressources et les charges de l’État, son examen par les membres des deux chambres du Parlement, veut que ces derniers puissent disposer de suffisamment de temps, pour l’analyser. L’Assemblée nationale étant l’autorité budgétaire, est donc fondée, soit d’adopter ce budget, selon qu’elle l’aura jugé réaliste, soit qu’elle le « rejette » carrément si jamais elle le trouvait peu réaliste par rapport aux capacités du Gouvernement à mobiliser les recettes prévues.

Dès lors, la balle se trouve dans le camp du Premier ministre, Jean-Michel Sama Lukonde, car appelé à déposer à temps, son projet de texte à la Représentation nationale. Sur pied de l’article 126 de la Constitution, « le projet de loi de finances de l’année, qui comprend notamment le budget, est déposé par le Gouvernement sur le Bureau du Parlement au plus tard le quinze septembre de chaque année » .

Par ailleurs, l’alinéa 6 du même article stipule que « Si, quinze jours avant la fin de la session budgétaire, le Gouvernement n’a pas déposé son projet de budget, il est réputé démissionnaire« . L’opinion se rappellera , le Premier ministre avait déposé le texte le 15 septembre. Ce qui a été un record inégalé, par rapport à tous ses prédécesseurs. Reste à savoir si Jean-Michel Sama Lukonde rééditera, cette fois-ci, le même exploit.

VIVEMENT UN PROJET PRO-SOCIAL

Au-delà des chiffres, l’enjeu d’un budget ici et ailleurs, est de répondre aux attentes de la population. En l’espèce, pour le cas de la RD Congo, la mise en œuvre du vaste et ambitieux projet de développement à la base dans les 145 territoires du pays, dépendra justement de la part que ce budget aura alloué à ces Entités territoriales décentralisées(ETD).

On rappelle que dans sa communication à l’occasion de la 64ème réunion du Conseil des ministres, présidée en vidéoconférence le vendredi 14 aout dernier, le Président Félix Tshisekedi avait recommandé au Gouvernement, de prendre en compte des activités intenses pro-investissement et pro-social dans le budget de l’exercice.

Pour le successeur de Joseph Kabila, la loi des finances  doit essentiellement viser la programmation des dépenses d’investissements dans les secteurs sociaux de base. Principalement, la santé, l’éducation, le développement rural ainsi que le secteur des infrastructures d’intégration nationale.

Problème, cependant, c’est qu’entre le dire et le faire existe un fossé béant.

FACE A LA POLEMIQUE, MBOSO ATTENDU AU FRONT DE LA VERITE

La session parlementaire de septembre en RD Congo s’ouvre dans un contexte dominé par la polémique autour des émoluments des députés nationaux. Combien touche en réalité, un député congolais? « Mystère »! Toujours est-il que près de deux semaines avant cette rentre rentrée parlementaire, l’opposant Martin Fayulu, dans un message adressé aux Congolais, avait jeté le pavé dans la marre.

Dans un communiqué, le « général 4 étoiles » du parti Engagement citoyen pour le développement (ECIDé), s’était dit scandalisé par ce qu’il a qualifié de hausse injustifiée des émoluments des députés nationaux. Aussi, Martin Fayulu s’était-il déclaré « profondément indigné d’apprendre que la rémunération des élus nationaux s’élève, depuis janvier 2022, à 21 mille dollars américains (soit environ 42 millions de francs de congolais), en violation flagrante de la loi budgétaire. »

« Dans un pays come la RD Congo, où 70% de la population vit avec moins de deux dollars américains par jour, il est difficile de comprendre qu’un député national soit rémunéré mensuellement 15 fois plus qu’un professeur des universités, 30 fois plus qu’un médecin et 200 fois plus qu’un huissier de l’Administration publique. Cela veut dire que le député d’un pays classé parmi les plus pauvres de la planète, est rémunéré plus qu’un député français ou américain. Tout part donc en vrille ! Comment peut-on expliquer qu’un pays en guerre et où les médecins et les enseignants d’universités sont en grève, puisse augmenter de plus de 100% la rémunération de ses députés nationaux ? Si l’on ajoute les sommes colossales versées aux sept membres du bureau, cette augmentation inexplicable représente pour le Trésor public, une charge supplémentaire de plus de 200 millions de dollars« , avait Martin Fayulu dans son communiqué.

Selon lui, les faits dénoncés sont constitutifs d’actes de corruption à grande échelle, de gabegie et de pillage éhonté des finances publiques. Aussi, ce leader de la plateforme Lamuka, a-t-il exigé une enquête des institutions chargées du contrôle des finances publiques pour établir les responsabilités dans cette affaire qu’il a qualifiée de « délinquance » financière. Et de conclure : « A ce stade, le moins que l’on puisse exiger, c’est la démission du bureau de l’Assemblée nationale et l’annulation immédiate de cette augmentation« .

Depuis, ces propos -révélations de Martin Fayulu ont administré une véritable piqûre épidermique à l’opinion. La polémique enfle de plus belle, aussi bien dans les rues de Kinshasa, sur la toile que dans la plupart des milieux professionnels. En l’occurrence, l’administration publique et les autres services de l’Etat.

Fayulu a-t-il dit la vérité ou des contre-vérités ? C’est donc à cette question que l’opinion attend fermement les quatre vérités de Mboso afin de tordre le cou à cette polémique qui n’a ni cesse ni fin, autour des émoluments des députés nationaux.

Toutefois, l’Assemblée nationale étant l’émanation directe du peuple, d’aucuns pensent que l’on ne devrait, ni entretenir un mythe autour du revenu des représentants nationaux ni en faire un tabou. Sur base du principe de répartition équitable du revenu national, nombreux sont des Congolais qui, dans la foulée de cette vive controverse autour des émoluments des députés nationaux, estiment qu’il faille carrément supprimer les fameux frais appelés « invisibles« , mais en réalité visibles, payés aux députés nationaux. Sinon, comment comprendre que l’Assemblée nationale, réputée Autorité budgétaire et donc, censure du Gouvernement, puisse s’illustrer par des actes qui l’anéantissent, à défaut de frelater les rapports entre les deux institutions. Tout bien considéré, on peut retourner cette question des émoluments des députés nationaux dans tous les sens. Il reste cependant, que la bouffe vient d’abord, ensuite la morale. Autrement, il faut d’abord donner à ces centaines de milliers de Congolais affamés, une importante part du gâteau pour clamer leur fringale.

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